Remontant à des temps sans doute immémoriaux, l’existence du Château de Pondres est attestée en 1195 grâce au testament du Seigneur d’Anduze. Sa composition et ses aménagements intérieurs évoluèrent au fil des siècles. Une importante campagne de travaux, menée au milieu du XVIIème siècle par Pierre II de Crouzet, Conseiller du Roy et Président de la Chambre des Comptes de Montpellier, donna au Château sa forme actuelle. Pillé à la Révolution, brûlé en son aile nord au début du XXème siècle qui le vit tomber peu à peu en désuétude, sa restauration complète, menée sous l’égide des Monuments Historiques, s’achève. Comme insensible aux agitations du temps, il retrouve aujourd’hui son allure majestueuse, devenant, au XXIème siècle, espace d’accueil, d’art et de culture.
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Aux origines
Les origines du Château de Pondres se perdent dans la nuit des temps. Un angle de mur situé à la base d’une cave du Château, sans correspondance avec le tracé des élévations actuelles, suggère l’existence de structures très anciennes, aujourd’hui disparues ou situées sous la Cour d’Honneur du Monument. Si les instances archéologiques font état d’une forte présomption de vestiges romains et gallo-romains – Temple et Relais de Poste sont au rang des conjectures – d’aucuns font remonter la vie en ces lieux aux époques Celtiques.
A proximité de la rivière, en limite basse du Domaine, un élément de plomb façonné de la main de l’homme et remonté de 12 m de profondeur par les récents travaux de forage, laisse nombre d’interrogations. La majesté et la profonde quiétude des lieux, enfin, situés non loin du site charcolitique de Fontbouisse, rappelant les espaces sacrés d’autrefois, laissent également augurer d’une présence humaine fort ancienne.
Le XIIéme siécle
Le premier écrit répertorié remonte à l’an 1195. Il s’agit d’un testament du Seigneur d’Anduze qui lègue à sa postérité « le château de pondres avec tout son droit » (1)
L’édifice de l’époque constituait place forte, et comprenait certainement l’actuel donjon et les structures inférieures des élévations occidentales et septentrionales du Château.
(1) L’essentiel des informations historiques sont issues de l’ouvrage rédigé au cours des années 2004-2005 par Claude PRIBEtICH-AZNAR, Architecte du Patrimoine, sous le titre « Diagnostic Patrimonial du Château de Pondres ». Cette Importante étude d’archéologie, d’archives et d’histoire fût diligentée par la Conservation des Monuments Historiques de la région Languedoc-Roussillon.
Le Haut Moyen-Âge
Depuis la fin du XIIème siècle, sur une période couvrant plus de quatre siècles, l’absence de pièces écrites résulte pour bonne part des ravages de la Révolution Française.« C’est le lundi 2 du mois d’avril 1792 environ vers 9 heures du matin que commença la desvastation du château de pondres » (2). Aux pillages du blé, du vin et autres denrées alimentaires, au vol des bijoux, effets personnels, objets et meubles d’art appartenant à M. et Mme le Marquis de Montlaur, succèda « l’incendie des archives, brûlées dans l’avant-cour du château » (2).
La mémoire orale néanmoins, transmise de générations en générations, atteste de la propriété du Château de pondres par la famille d’Anduze jusqu’en l’an 1400. Au début du XVème siècle, le fief de Pondres, devenu très important par un ensemble d’acquisitions et de conquêtes, entra par alliance dans le patrimoine du puissant Seigneur de Ganges. Le 28 mars 1651, les « château, terre et seigneurie de Pondres » furent vendues à Pierre II de Crouzet, « Conseiller du Roy en ses Conseils Président de la Chambre des Comptes de Montpellier ».
(2) « Manuscrit anonyme pour suppléer aux papiers qui furent brûlés dans les archives », en recueil dans souvenirs de Gabriel Joseph Villardi de Quinson, marquis de Montlaur, seigneur de Pondres à la Révolution.
Le XVIIéme siècle
Pierre II de Crouzet entreprit une campagne de travaux très importante, étalée sur une dizaine d’années à partir de l’an 1654.
Ces travaux firent l’objet de « prix-faits » détaillés et notariés, concernant la production de pierres de taille, de menuiseries, de serrureries relatives au château, mais également relatifs à la construction d’écuries, de communs, d’une écluse et de divers aménagements du Parc.
Pierre II de Crouzet a donné au Château de Pondres l’essentiel de sa composition actuelle. La mise en œuvre de la cage d’escalier monumentale semble relever de cette époque. Son fils, Pierre III de Crouzet, présenté comme « Chevallier, Conseiller du Roy, Président en la souveraine Cour des Comptes Aydes et finances de Montpellier » fit de Pondres le siège du marquisat de Montlaur, par son mariage avec Anne-Jeanne de Bousquet de Montlaur le 17 janvier 1686.
Le XVIIIéme siècle
Pierre IV de Crouzet, marquis de Montlaur, succède à son père troisième du nom. Anne-Jeanne, son unique enfant, par mariage avec Joseph Henri Eugène, fait entrer le blason des Villardi Quinson au Château de Pondres en 1740. A Joseph Henri Eugène et son fils Gabriel Joseph reviennent la paternité des embellissements somptueux de l’aile nord du Château et de nombre de plantations maîtresses du Parc. « Il avoit dépensé des sommes très considérables » et du Château « l’avoit rendu un des manoirs de la province le plus agréable ».
Le XIXéme siécle
Joseph Isidor de Montlaur, âgé de 13 ans, avait fui Pondres avec son père Gabriel Joseph Villardi Quinson de Montlaur en 1792, au soir de la dévastation du Château, pour se réfugier en Allemagne. Il revient en ses terres au début du siècle, pour en hériter, ainsi que de nombre de propriétés avoisinantes – domaine de la Clotte, domaine de Villa, mas de Raymonville –, au décès de son père en l’an 1818.
Musicien de talent, Maire de Villevieille à 3 reprises, Joseph Isidore gère l’immense domaine agricole qu’il étend par une vaste campagne d’acquisitions foncières. On lui doit notamment le portail monumental positionné sur la route d’Alès, aujourd’hui déplacé à l’entrée des Moulins devenue l’entrée principale du Château de Pondres.
A cette époque est dessiné un plan de la propriété précis et soigné, qui représente des aménagements tant bâtis que paysagés remarquables. Fût-il indicatif de la réalité du domaine au milieu du XIXème siècle, ou un état projeté que les marquis de Montlaur ont souhaité mettre en œuvre ?
Au rang des certitudes par contre, la reconstruction intégrale de l’aile sud à partir du grand portail et de la Tour du Levant, comprenant une recomposition intérieure complète des pièces, fût l’œuvre de Raymond Archambaud de Montlaur, fils de Joseph Isidore, à la tête de la seigneurie au décès de son père le 25 décembre 1843. Raymond Archambaud de Montlaur, chimiste et alchimiste de génie, découvrit probablement dans son laboratoire construit au sommet du donjon le chlorate de potassium, qui connut d’immenses applications industrielles.
La réalisation des pièces somptueuses du 1er étage au midi lui sont vraisemblablement imputables, comme également la mise en place des crénelages et de la bretèche en couronnement de l’aile nord du Château. Elie Esprit Ghislain Amaury de Montlaur reçut par donation de son père Raymond Archambault le 22 février 1896 le « château et domaine de Pondres, parc bâtiments et usines en dépendant et composé du Château de Pondres, communs, bâtiments d’habitations et d’exploitation, cave avec foudres et vaisselle vinaire, moulin à huile, tuileries, cours, jardins, près, pièces d’eau, parc, terre, vignes, bois, pâture, hermes, muriettes et olivettes d’une contenance de 112.60 ha […] »
Le XXéme siécle
Le 5 février 1920, par devant notaire Chrestien de Sommières, Elie Esprit Ghislain Amaury Villardi de Quinson, marquis de Montlaur, vend le Château de Pondres et ses dépendances à Jocelyn Auguste Pécout, ingénieur agronome. Au décès de ce dernier, au cours de la seconde guerre mondiale, le domaine historique de Pondres entre dans le patrimoine de la famille Debras. Au XXème siècle, le Monument tombe en désuétude. Nombre d’aménagements remarquables du Parc disparaissent sous la luxuriance de la végétation. L’écroulement de toitures puis de planchers amorcent la ruine du Château, dont la Tour nord-ouest menace d’effondrement.
Le Domaine Historique de Pondres est vendu en février 2002 au Conseil Général du Gard, qui le cède à son tour le 20 novembre 2006 dans le cadre d’un cahier des charges très précis. S’ouvre alors une immense campagne de travaux, qui durera 10 années. Sous l’égide de la Conservation des Monuments Historiques, chaque pierre, chaque arbre, chaque élément remarquable du Château, de ses dépendances et de son parc sera réparé, consolidé, remplacé, restauré, dans les Règles traditionnelles de l’Art et le respect de l’Histoire.
Doté des conforts les plus modernes, le Château de Pondres, en ce jour de printemps, apprête son retour à la Vie.
Pondres, le 20 mars 2017.
L'incendie de 1792
« Monsieur Gabriel Raimond Villardi…
Car la révolution qui eut son commencement en 1789 n’avoit jamais altéré son genre de vie, loin de s’occuper encore moins de se mêler des affaires publiques, il avoit passé les trois premières années dans le plus grand calme, ne cessant de faire ses délices en son Château du progrès de l’agriculture, aussi lorsqu’il apprit le dimanche au soir premier d’avril 1792 que les Châteaux du Grand Galargues, Aubais, Aujargues, étoient dévastés par une troupe de brigands, s’il éprouva le sentiment de la douleur la plus vive pour les désastres qui se comettoient, il ne put craindre pour lui-même, rassuré par le témoignage de sa conscience… Tranquille dans son Château, il résista longtemps à ceux de sa famille qui le prièrent instamment de se retirer et ce ne fut que lorsqu’il vit lui-même cette horde d’incendiaires fondre sur son Château, qu’il se retira à la hâte à travers champs, traversa le Vidourle à Salinelle, où il se seroit reposé quelque temps, s’il n’avoit été bientôt forcé pour mettre sa vie en sureté, d’en partir avec Mr son second fils Isidor avec lequel il fut à Busignargues et de là à Montpellier où il arriva vers les neuf heures du soir.
C’est le lundi 2 du mois d’avril 1792 environ vers neuf heures du matin que commenca la dévastation du Château de Pondres. Durant plusieurs jours et même plusieurs semaines, il fut la proie des brigands. Le bled, le vin qui s’y trouvaient furent donnés en quantité à ces brigands, par ceux la même qui disoient être venus au nom de la loi pour arrêter toute dévastation, tout incendie. En vain quelques ouvriers entre autre Antoine Armajon, menuisier d’Aujargues, animés par le sentiment de reconnaissance, tentèrent d’y pénétrer quelques jours après. Ils furent repoussés par les gardes. Ce que M. le Marquis avait de plus précieux avoit été déposé dans différentes cachettes, une dans le boudoir de Madame la Marquise de Montlaur,(ce boudoir étoit superbe il y avoit quarante cinq glaces grandes et petites, la porte en avoit été fermée en forme d’armoire, on fit pour y entrer une brèche dans la chambre de Mr le Marquis dans l’avant boudoir où il y avoit tout le linge de maison et ses robes) qui n’enfermoit des effets précieux pour le prix de cent mille francs, ainsi que l’a dit Mme la Marquise à Antoine Roumajon après la dévastation. L’autre étoit un cabinet obscur dont la porte étoit en fer, que l’on ne put jamais ouvrir et dans lequel on entra par une brèche que l’ont fit dans le côté gauche de la porte. Il y en avoit trois dans le cabinet qui fut ouvertes. Dans un seul on retrouva et l’on sauva une huillière de porcelaine garnie en argent. Dans le cabinet au nord de l’appartement de M. le Comte de Quinson, père de M. le Marquis, on avoit réuni le plus de meubles les plus précieux et l’on avoit fermé la porte avec des briques. L’on tomba les briques et tout fut perdu…
Non seulement le Château fut dévasté, mais les incendiaires portèrent leur fureur dans les cours du Château. Ils tuèrent un beau chien qu’on appelloit Clinton et qui étoit à l’attache. Ils tuèrent deux cygnes superbes qui étoient au bassin, lequel ils mirent à sec pour prendre les poissons ou peut-être le trésor qu’ils croyoient qu’on y avoit jeté. Il y avoit au milieu de ce grand bassin un homme de plomb qui fut pris par les brigands. La dévastation du Château de Pondres fut suivie de l’incendie des archives. La porte étoit de fer, elle fut forcée et enfin ouverte avec beaucoup de peine : ce fut le mardi trois du mois d’avril que l’on mit le feu aux archives. Mais comme il s’éteignit bientôt, on prit tous les papiers, on les porta à l’avant cour du Château où ils furent brulés. De tous les papiers que renfermoient les archives, il ne reste qu’un acte de la donation de Pondres écrite en parchemin, que l’on déchiffre avec peine et dont voici l’extrait… »
Les archives de Pondres renfermoient une multitude de papiers qui donnoient des détails aussi intéressant qu’honorables à la famille de Mr le Marquis de Montlaur. Plusieurs de ses ancêtres avaient reçus des preuves de bienveillance et d’estime de la part des Souverains de France et d’Italie… J’ai demandé durant l’hiver 1803 à Mr le Marquis de Montlaur tout ce que sa mémoire pouvoit lui fournir sur les papiers qu’il avoit autrefois lus dans ses archives…